La réforme de la formation professionnelle reconnaît la formation sur le lieu et pendant le temps de travail comme formatrice : « L’action de formation est un parcours pédagogique permettant d’atteindre un objectif professionnel. Elle peut être réalisée en tout ou partie à distance. Elle peut également être réalisée en situation de travail (Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 — art. 4).
L’AFEST, pour Action de Formation en situation de Travail, est le résultat d’une expérimentation menée par la DGEFP dès novembre 2015, en collaboration avec les partenaires sociaux (Copanef, FPSPP) et l’appui du réseau Anact-Aract. Initialement, la vocation de l’AFEST était de faire bénéficier aux salariés peu qualifiés des TPE PME de conditions favorisant le développement d’actions de formation.
Ce sont les résultats des travaux du groupe susvisé qui ont inspiré le législateur et ont abouti à la publication d’un rapport sur l’AFEST, suivi d’un décret encadrant cette modalité de formation.
Quelles sont les composantes d’une AFEST ?
Elles ont été définies par le Décret relatif aux actions de formation (n° 2018-1341 du 28 décembre 2018).
Ce que comprend la mise en œuvre d’une action de formation en situation de travail :
- L’analyse de l’activité de travail pour l’adapter à des fins pédagogiques ;
- La désignation d’un formateur tuteur ;
- La mise en place de phases réflexives, distinctes des mises en situation de travail. Leur objectif est d’utiliser à des fins pédagogiques, les enseignements tirés de la situation de travail. Cela permet d’observer et d’analyser les écarts entre les attentes, les réalisations et les acquis de chaque mise en situation afin de consolider et d’expliciter les apprentissages ;
- Des évaluations spécifiques des acquis de la formation qui jalonnent ou concluent l’action.
Ainsi, désormais toutes les entreprises peuvent organiser la formation continue de leurs salariés en interne, sans avoir recours aux formations externes.
Les points clés du déploiement de l’AFEST
L’AFEST s’appuie sur un binôme constitué d’un apprenant et d’un référent formé. Il faut souligner que le travail ne peut être formateur que s’il existe des séquences d’analyse et de prise de recul. Ainsi, l’activité modélisée devient formatrice.
Toutefois, l’AFEST n’équivaut pas à une formation sur le tas, car toutes les situations de travail ne sont pas porteuses de potentiels formatifs. Pour garantir le volet de la formation dans l’AFEST, il faut réunir plusieurs éléments :
- l’ingénierie pédagogique et de projet ;
- un tuteur formateur ;
- un parcours pédagogique avec une visée professionnelle ;
- l’alternance de façon répétée de séquences d’apprentissage en situation de travail et des phases de réflexivité.
Pour favoriser la qualité de la l’AFEST, certains points doivent être respectés parmi lesquels :
- OPPORTUNITÉS : mesurer l’opportunité et la faisabilité de l’AFEST (répond-elle à un besoin ? Pour quelles compétences ?)
- ACTEURS : identifier les acteurs (décisionnaires, personnes ressources, formateur/tuteur, l’organisme de formation, le salarié formé…).
- ACTIVITÉ/TRAVAIL : définir de manière précise le travail prescrit et le travail réel. Il faut en effet analyser les situations de travail et repérer les compétences qui peuvent s’acquérir en situation de travail et être transformées en actions de formation avec un objectif professionnel.
- DIAGNOSTIC : diagnostiquer le degré d’autonomie de son organisation et la nécessité d’un appui extérieur (consultant ; organisme de formation…).
- ORGANISATION : mettre en place une ingénierie, définir le parcours pédagogique et le contenu de la formation, déterminer les compétences à acquérir et les objectifs professionnels, fixer le contenu de la phase de réflexivité, réaliser un livret comportant les objectifs, les activités, les évaluations…).
- PARCOURS FORMALISÉ : déployer le parcours pédagogique réalisé, alternance de mises en situation et moments de réflexivité.
- INDICATEURS : mettre en place des indicateurs de mesure de la progression des apprenants.
- BILAN : faire le point sur les apports de cette démarche, repérer les axes d’amélioration, réfléchir à l’impact sur l’organisation du travail et le management.
Le processus pédagogique de l’AFEST se caractérise par des apprentissages inductifs liés à aux situations singulières rencontrées dans le travail et comportant un séquençage pédagogique précis.
Comment s’organise une AFEST ?
L’AFEST est articulée autour de deux séquences pédagogiques distinctes qui sont réalisées autant de fois que cela est nécessaire afin d’atteindre les apprentissages ciblés.
Séquence 1 la mise en situation : le salarié est placé dans une situation réelle de production avec une visée pédagogique dont il est informé.
Séquence 2 la phase réflexive : ce temps de prise de recul, en dehors du temps de production de l’activité, peut être accompagné par un formateur interne ou externe.
Les objectifs sont les suivants :
- extraire les enseignements du déroulement de la séquence 1 ;
- analyser et mesurer les écarts entre les attendus, les réalisations et les acquis ;
- renforcer et expliciter les apprentissages.
Basée sur le modèle du learning by doing (apprendre en faisant), avec une forte implication de l’apprenant et une pédagogie participative et différenciée, l’AFEST comporte de nombreux avantages.
Quels sont les atouts de ce type de formation ?
Cette méthode comporte des avantages pour toutes les parties prenantes.
Pour les salariés apprenants :
- Elle se déroule en situation de travail (facilite les apprentissages ; méthode concrète et opérationnelle) ;
- Elle est efficace pour le développement des compétences (mise en adéquation des situations professionnelles et le développement des compétences) ;
- Elle peut donner envie de se former en rendant lisible et visible la formation (notamment pour les personnes peu qualifiées plus rétives au départ en formation).
Pour les entreprises :
- Elle est reconnue par la loi comme action de formation ;
- Sa structuration facilite les apprentissages (alternance de séquences de mises en situation à visées didactiques, articulées à un temps de réflexivité) et la capitalisation des connaissances et compétences de l’organisation ;
- Elle valorise la formation en entreprise et le travail (vecteur de l’acquisition de compétences en situation de production) ;
- Elle apporte un gain de temps ;
- Son coût est restreint.
Pour les formateurs :
- L’AFSET peu être porteuse d’une réelle efficacité pédagogique (l’acquisition des compétences est plus rapide que pour les formations traditionnelles) ;
- Elle participe au développement des compétences pédagogiques et techniques des formateurs.
Pour les organismes de formation :
- Les organismes de formation peuvent aider les entreprises à déployer leur méthode de formation en situation de travail notamment sur le plan de la pédagogie (contenu de formation, formalisme respectant le cadre réglementaire, réalisation des supports, etc.).
- Ils peuvent proposer de l’accompagnement au tutorat.
- Il est indispensable de s’appuyer sur l’expertise d’un formateur externe dans une logique de co-construction d’une formation.
Les conditions de réussite de l’AFEST
L’AFEST est porteuse d’un changement de paradigme pour les acteurs de la formation. En effet, dans le champ de l’AFEST, le travail n’est plus le principal moyen d’appliquer ce qui a été vu en formation, mais le support à partir duquel on bâtit les compétences et l’acquisition de savoirs.
Une AFEST réussie nécessite une véritable volonté de l’employeur de former et un réel désir des salariés d’être formés. Cela implique la réunion de solides conditions organisationnelles et managériales.
Le cadre de l’AFEST suppose de dépasser certaines des limites des apprentissages fortuits. L’AFEST complète les modalités de formation existantes, mais ne doit pas remplacer les formations classiques, car la formation de qualité favorise le développement de l’employabilité.
Il est très important de privilégier les formations multimodales (formation à distance ; formation en situation de travail et formation en présentiel) et d’y associer les outils du numérique, sous différents formats.
En outre, comme cela est dit dans le rapport sur l’AFEST, toutes les situations de travail ne sont pas apprenantes et certaines peuvent même être qualifiées de “désapprenantes”. Une AFEST mal construite n’aura aucun bénéfice ni pour l’organisation ni pour les salariés, d’où l’intérêt d’être bien accompagné.